Lonicera
Les Chèvrefeuilles (genre Lonicera) sont des arbustes ou lianes de la famille des caprifoliacées. Certaines espèces sont aussi nommées communément camérisiers. On en connaît environ 200 espèces dans les régions tempérées de l'hémisphère nord et les régions subtropicales. L'habitat de la plupart des espèces de chèvrefeuilles est la lisière des forêts et, par extension, les haies, bords de chemins creux. Les chèvrefeuilles, autochtones ou exotiques, sont fréquemment utilisés pour former des haies ou parois décoratives.
Étymologie
Le nom Lonicera a été donné en 1703, à la place du nom originel Caprifolium, par Charles Plumier (1646-1704), en hommage à Adam Lonitzer (1528-1586), botaniste et médecin allemand[1],[2]. Carl von Linné a gardé ce nom de genre tout en mentionnant, comme épithète spécifique pour l’espèce type du genre, le nom générique originel, nommant ainsi l'espèce Lonicera caprifolium[3],[note 1].
Écologie, faune associée
Chenille mangeant une feuille de chèvrefeuille.
Le
Sylvain azuré (
Limenitis reducta) est l'un des papillons de jour dont la chenille se nourrit du chèvrefeuille
Noisetier déformé par l'enlacement d'un chèvrefeuille
Comme les autres lianes, ils offrent un habitat supplémentaire aux oiseaux, et facilitent le déplacement dans les arbres et buissons de certains insectes et petits mammifères. Leurs fleurs sont surtout liées à diverses espèces d'insectes de l'environnement nocturne, souvent à longue trompe, qui sont en Europe :
- des Sphinx, dont le Sphinx gazé (également nommé Sphinx du chèvrefeuille), le Sphinx bourdon, le Sphinx phœnix et le Sphinx du troène[4].
- Les feuilles sont mangées par des noctuelles, notamment la Cléophane du chèvrefeuille, le Iota, la Noctuelle du camérisier, la Noctuelle aréolée, la Noctuelle rameuse (inféodée au chèvrefeuille et surtout trouvée sur L. xylosteum). Les chenilles de ces papillons sont dites cryptiques (camouflées) et ne sont généralement actives que la nuit[4].
- Une quinzaine de papillons de la famille des Geometridae produisent des chenilles arpenteuses qui peuvent se nourrir de chèvrefeuille (sans en être dépendant, sauf l'Ennomos du lilas qui lui semble plus associé).
- Les espèces cultivées sont parfois endommagées par un microlépidoptère, l'Ypsolophe dentelé[4].
- Des papillons de jour (rhopalocères), dont quelques Nymphalidés, produisent des chenilles qui grandissent sur le chèvrefeuille. Ce sont par exemple :
D'autres insectes que des papillons apprécient le chèvrefeuille :
- le jour, certains bourdons et xylocopes peuvent s'y nourrir de nectar en perforant les corolles trop longues pour qu'ils y aient directement accès[4]. Quelques papillons de jour s'y nourrissent, mais c'est la nuit que son odeur attire les pollinisateurs ;
- plusieurs espèces de tenthrèdes (Hyménoptères symphytes) produisent des larves de 2 cm maximum qui ressemblent à des chenilles, et qui consomment aussi les feuilles de chèvrefeuille. C'est le cas en France de Tenthredo vespa (nl) et T. livida, qui se cachent le jour, enroulés sous les feuilles, pour s'activer la nuit[4] ;
- en France, au moins 4 espèces de Cimbicidés (du genre Abia) consomment le chèvrefeuille. Ce sont : A. lonicerae, A. fasciata, A. aurulenta et A. mutica, Abia mutica étant inféodée à L. periclymenum[4] ;
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Cicadelles (opophages), dont Ficocyba ficaria qui dépendent du figuier Ficus carica l'été, mais de chèvrefeuilles l'hiver, alors que Empoasca apicalis en dépend l'été, avant d'émigrer vers l'aulne blanc, le genévrier et l'épicéa commun à partir de l'automne[4] ;
- des pucerons se développent sous les feuilles de Lonicera, dont le Puceron du Chèvrefeuille et le puceron du fenouil, proche du précédent, se développant sur L. xylosteum uniquement. Des aleurodes et plus rarement des cochenilles (Cochenille du cornouiller et Cochenille à carapace du pêcher) sucent également la sève du Chèvrefeuille.
Ces 3 groupes d'insectes opophages peuvent se montrer nombreux quand leurs prédateurs sont absents. Leur miellat peuvent alors noircir les feuilles de fumagine et freiner l'expansion de chèvrefeuilles d'ornement[4] ; - un très petit bupreste, l'Agrile bleuâtre, vit (non exclusivement) sur cette plante (dans toute la France métropolitaine). Sa larve vit dans les branches mortes ou sénescentes, d'où l'adulte émerge en juin-juillet[4] ;
- un petit longicorne filiforme, l'Obérée pupillée, est (pour sa larve) inféodé à quelques espèces de chèvrefeuilles (L. caprifolium, L. tatarica, L. xylosteum et L. etrusca) ;
- divers charançons, dont Otiorhynchus clavipes qui produit des larves pouvant endommager les racines de plusieurs espèces de chèvrefeuille, alors que l'adulte (nocturne) se nourrit sur les feuilles en y creusant des « entailles marginales semi-circulaires caractéristiques »[4] ;
- On y trouve aussi des moucherons (quelques Cécidomyies, dont Contarinia lonicerae, ou diverses espèces de Dasineuraet Macrolabis). De très petites galles parenchymateuses peuvent abriter une larve de Dasineura xylostei (encore méconnu), de même pour Dasineura excavans sur les feuilles de L. xylosteum[4].
La Mouche mineuse des chèvrefeuilles des bois (1,5 à 2,2 mm) pond des œufs d'où émergent des larves mineuses creusant en été des galeries (« Mines ») dans l'épaisseur de la feuille où l'on voit par transparence la larve blanche[4]. Une autre espèce de mouche mineuse, Aulagromyza hendeliana, est plus précoce (galeries dès avril) et se nymphose hors de la feuille[4].
L'OPIE (Office pour les insectes et leur environnement) signale en 2009[4] un développement récent apparent de la Sésie du chèvrefeuille (facilement confondue avec un Hyménoptère), à partir des Alpes vers le reste de la France. Sa chenille se développe très lentement (2 à 3 ans) et uniquement sur certains chèvrefeuilles.
Toxicologie
Les chèvrefeuilles seraient toxiques par leurs baies[5].
Liste d'espèces
Liste selon les divers sites
Selon The Plant List (1 mai 2020)[6] :
Selon Tropicos (1 mai 2020)[7] (Attention liste brute contenant possiblement des synonymes) :
Espèces du genre Lonicera par zones géographiques
Flore européenne
Selon la flore de France, six espèces non grimpantes (dont L. xylosteum) et 5 espèces grimpantes (dont L. caprifolium et L. periclymenum…) peuvent être observées en France, outre quelques espèces exotiques introduites.
Flore de Chine
- Flore de Chine, d'après eFloras[8]. 57 espèces, dont 23 endémiques.
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Lonicera acuminata Wallich in Roxburgh, 1824.
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Lonicera angustifolia Wallich ex Candolle, 1830.
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Lonicera alpigena complexe d'espèces
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Lonicera bournei Hemsley, 1888.
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Lonicera caerulea Linnaeus, Chèvrefeuille bleu
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Lonicera calcarata Hemsley, 1900.
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Lonicera chrysantha Turczaninow ex Ledebour, 1844.
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Lonicera crassifolia Batalin, 1892.
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Lonicera elisae Franchet, 1883.
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Lonicera ferdinandi Franchet, 1883.
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Lonicera ferruginea Rehder in Sargent, 1902.
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Lonicera fragrantissima Lindley & Paxton in Paxton, 1852, Chèvrefeuille d'hiver
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Lonicera gynochlamydea Hemsley, 1888
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Lonicera hildebrandiana Collett & Hemsley, 1891
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Lonicera hispida species complex
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Lonicera humilis Karelin & Kirilov, 1842.
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Lonicera hypoleuca Decaisne in Jacquemont, 1841.
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Lonicera japonica Thunberg in Murray, Syst. Veg., ed. 14. 216. 1784, Chèvrefeuille du Japon
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Lonicera ligustrina Wallich in Roxburgh, 1824.
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Lonicera ligustrina var. yunnanensis Franchet, 1896.=Lonicera nitida E. H. Wilson, Gard. Chron. ser. 3, 50:102. 1911 (d'après GRIN) =L. pileata Oliver f. yunnanensis (Franchet) Rehder
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Lonicera ligustrina var. pileata (Oliver) Franchet, 1896=Lonicera pileata Oliver, 1887, chèvrefeuille cupule
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Lonicera ligustrina var. ligustrina
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Lonicera longiflora (Lindley) Candolle, 1830.
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Lonicera maackii (Ruprecht) Maximowicz, 1859, Chèvrefeuille de Maack
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Lonicera macrantha complexe d'espèces
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Lonicera maximowiczii complexe d'espèces
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Lonicera microphylla Willdenow ex Schultes, 1819.
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Lonicera mucronata Rehder, 1903.
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Lonicera modesta Rehder in Sargent, 1907.
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Lonicera nigra complexe d'espèces
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Lonicera praeflorens Batalin, 1892.
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Lonicera rupicola J. D. Hooker & Thomson, 1858
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Lonicera ruprechtiana Regel, 1869.
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Lonicera setifera Franchet, 1896.
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Lonicera spinosa (Decaisne) Jacquemont ex Walpers, 1843.
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Lonicera subaequalis Rehder, 1903.
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Lonicera tatarica Linnaeus, 1753.
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Lonicera tangutica complexe d'espèces
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Lonicera tomentella J. D. Hooker & Thomson, 1858.
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Lonicera tragophylla Hemsley, 1888.
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Lonicera trichosantha Bureau & Franchet, 1891.
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Lonicera tubuliflora Rehder in Sargent, 1911
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Lonicera yunnanensis Franchet, 1896.
Le chèvrefeuille dans la culture
Caprifolium nom historique du Lonicera
En 1888 Legrand, déplorant le remplacement des noms de genre de Tournefort, nous dit « Si Linné est le créateur de la combinaison binaire, n'oublions pas que Tournefort est le créateur du genre » et il cite notamment, en le regrettant, le remplacement de Caprifolium par Lonicera[9].
Le mot caprifolium, désignant à l'origine le chèvrefeuille, remonte au Haut Moyen Âge. On trouve dans un manuscrit du IXe siècle, le Codex Parisinus Latinus, une liste de plantes dont Dorcadis caprolus dont on ne peut être sûr qu’il se réfère au caprifolium[10].
Dans nombre d’encyclopédies médicales médiévales, qui ont été compilées à la Renaissance, on trouve le nom de caprifolium.
- Un écrit de Simón Januensis, encyclopédiste du XIIIe siècle, nous dit, à propos d'une plante qu'il nous est difficile d'identifier, « Periclimenos [...] certains l'appellent caprifolium »[11].
- Le nom est mentionné aussi dans Matthaeus Silvaticus (1280-1342)[12] dans son Pandectae Medicinae[note 2],[13].
- De même, Ruellius et Fuchsius [note 3] appellent la plante caprifolium.
Noms vernaculaires, populaires ou locaux du chèvrefeuille
Le chèvrefeuille était appelé par Dioscoride (40-90 ap. J.-C), médecin et botaniste grec, periclymenus [note 4].
Cependant, la plante désignée par le mot caprifolium a pu être confondue avec le troène (Ligustrum). En effet, dans un dictionnaire étymologique allemand, nous trouvons « caprifolium liguster », « liguster » étant le nom commun allemand pour « troène »[14].
Une multitude de noms vernaculaires, noms communs ou noms locaux ont été donnés au Caprifoilum, citons notamment « Chamécerisier » ou « Camécerisier » [15].
Les anglophones l’appellent « honeysuckle », littéralement « suceur de miel » probablement en raison de son caractère mellifère.
La Flore Populaire d’Eugène Rolland (1846-1909) de 1906 fait une compilation exhaustive des noms donnés à plusieurs espèces de chèvrefeuille, en Europe francophone et dans les régions et villages de France allant de Capra mater à « cerisier des Alpes »[16]. Parmi plus de 200 appellations, citons :
- cabrifuelh (ancien provençal),
- cabrofuelho (Laguiole, Aveyron),
- chevrèfël (Pas-de-Calais),
- chioraffou (Suisse),
- tyévrafou (Suisse),
- tchabro-flour (Ardèche),
- queue de pipe (Luxembourg),
- més dé lébré (Gascogne),
- bô de hhmèl’ (Ban de la Roche ancienne commune du Bas-Rhin),
etc.[16].
Langage des fleurs
Fleurs de chèvrefeuille en développement. Juillet 2020.
Dans le langage des fleurs, le chèvrefeuille symbolise l'amitié et l'amour[17].
Calendrier
Dans le calendrier républicain français, le 23e jour du mois de Prairial est dénommé jour du Chèvrefeuille[18]
Cinéma
Notes et références
Notes
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↑ Linné mentionne aussi le nom de Tournefort à côté de l'ancien nom de genre.
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↑ Pandectae : « livre qui renferme tout en soit » ; « collection encyclopédique »
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↑ Jean Ruel (1474-1537 ) et Leonhart Fuchs (1501-1566)
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↑ Du grec περιχλύμενος / periklýmenos, chevrefeuille
Références
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↑ P.-V. Fournier. Les quatre flores de la France, Lechevalier, Paris, 1990 (ISBN 978-2-7205-0529-4), page 886
-
↑ Carolo Plumier. Nova plantarum americanarum genera, Parissis, 1703, 21 pages + 40 illustr., p.17 : lire en ligne
-
↑ Caroli Linnnaei. Genera plantarum. Lugduni Batavorum (Leyde, Hollande), 1742, 527 pages, p. 174 : : lire en ligne
-
↑ a b c d e f g h i j k l m n o et p Hervé Guyot & Remi Coutin, Fiche pédagogique : La faune entomologique des chèvrefeuilles, "Insectes" no 154, p. 18 à 22,- 2009 (3)
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↑ Chèvrefeuille des haies sur Floranet.
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↑ The Plant List (2013). Version 1.1. Published on the Internet; http://www.theplantlist.org/, consulté le 1 mai 2020
-
↑ Tropicos.org. Missouri Botanical Garden., consulté le 1 mai 2020
-
↑ (en) Référence EFloras : L. 1753 {{{3}}}
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↑ M. A. Legrand. Essai de réhabilitation des genres de Tournefort, Bull. Soc. Bot. France, 35:2, 133-139, 1888 Pdf p. 5 : lire en ligne
-
↑ Codex Parisinus Latinus : lire en ligne
-
↑ Simón Januensis. Clavis sanationis sive Synonyma medicinae. Venise, 1486. lire en ligne
-
↑ Antoine Furetière. Dictionaire universel, contenant generalement tous les mots francois, 1690, t.1 A-E, : lire en ligne
-
↑ Pandectae Medicinae, opus pandectarum, Lugduni (Lyon) 1591 p. 29 : lire en ligne
-
↑ Franzosisches etymologisches" "caprifolium" : lire en ligne
-
↑ Abbé Toussaint. Étude étymologique sur les flores normande, 1906. p. 168 : lire en ligne
-
↑ a et b Eugène Rolland. Flore Populaire, Paris, 1906, t. 6, p. 215-219, 222-226 lire en ligne
-
↑ Anne Dumas, Les plantes et leurs symboles, Éditions du Chêne, coll. « Les carnets du jardin », 2000, 128 p. (ISBN 2-84277-174-5, BNF ).
-
↑ Ph. Fr. Na. Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, p. 27.
Voir aussi